Carte blanche : « Diminuer les allocations familiales, c’est augmenter la précarité »

Prendre soin, un choix de société
Le “prendre soin” ne peut être relégué aux marges des politiques publiques. Il doit en être le cœur. Prendre soin, c’est reconnaître que les familles, les femmes, les enfants, les personnes précarisées ne sont pas des charges, mais des piliers de notre avenir commun. C’est refuser d’imposer aux plus fragiles les conséquences de choix budgétaires désincarnés. C’est construire des dispositifs de soutien qui permettent à chacun de vivre dignement.
Solidarité et santé
Les allocations familiales font partie de ces dispositifs et sont un levier de santé publique. Elles permettent un accès plus équitable à une alimentation saine, à des soins médicaux, à des logements salubres et à une éducation de qualité. Réduire ces aides, c’est exposer les enfants à davantage de stress, de carences, et de pathologies liées à la précarité. La santé commence dans les foyers. Et les allocations familiales sont un outil essentiel pour garantir que chaque enfant, chaque parent, puisse vivre dans des conditions dignes.
Un pilier centenaire de notre solidarité
Les allocations familiales constituent un pilier centenaire de notre solidarité. Depuis leurs prémisses en 1921, à leur institutionnalisation en 1930, et leur régionalisation en 2014, et aujourd’hui, le système a progressivement évolué pour sortir d’un modèle nataliste et mieux soutenir les familles d’un et deux enfants, et les familles à bas revenus. Mais le cœur du modèle est resté constant : assurer une solidarité envers les familles, considérant la charge financière importante liée aux enfants.
Une réforme aux conséquences lourdes
Aujourd’hui, ce système est menacé. En Wallonie, des propositions budgétaires envisagent de limiter les allocations familiales à un nombre défini d’enfants par famille (maximum 4) ou de ne plus indexer les allocations octroyées. Bref, de faire reposer les difficultés budgétaires sur les épaules des enfants.
Précariser les familles nombreuses
Supprimer les allocations après le quatrième enfant, c’est ignorer la réalité des familles nombreuses. C’est aussi nier le rôle fondamental de ces aides dans la lutte contre la pauvreté infantile. Rappelons que les allocations familiales ne couvrent qu’une infime partie des frais liés à l’éducation d’un enfant. Cette réforme serait injuste et inefficace, aggravant les inégalités sociales et fragilisant les familles déjà en difficulté. Cela a d’ailleurs été spécifiquement étudié dans le cadre d’une évaluation du dispositif et les conclusions des scientifiques est sans appel : ces mesures constituent un risque en terme de pauvreté infantile.
Toutes les familles concernées, celles à bas revenus et monoparentales en première ligne
Un saut d’index sur les allocations familiales pénaliserait toutes les familles wallonnes. Celles de la classe moyenne, qui sont déjà nombreuses à avoir du mal à payer les crèches de plus en plus chères, les frais scolaires, les garderies scolaires qui augmentent dans beaucoup de communes, les activités extrascolaires, leur logement. Mais la perte serait plus importante encore pour les familles à bas revenus, notamment les familles monoparentales, qui bénéficient de suppléments sociaux, également non indexés. En Wallonie, 30 % des familles sont monoparentales, et plus de la moitié vivent sous le seuil de pauvreté. De plus, 80% des personnes à la tête d'une famille monoparentale sont des femmes. Une telle réforme aura donc comme impact de creuser encore les inégalités entre les femmes et les hommes en Wallonie. Réduire les allocations, alors que dans ces foyers, un seul revenu doit couvrir tous les besoins, c’est aggraver une précarité déjà alarmante et mettre en péril l’équilibre de familles qui tiennent déjà à bout de bras.
Pour préserver la dignité et la santé de toutes et tous, il est impératif de ne pas toucher aux allocations familiales ni au budget des soins de santé : ces dispositifs sont le socle de notre solidarité et doivent rester intacts pour garantir un avenir plus juste et plus sain à chaque famille.
Signataires :
- Elise Derroitte, pour la Mutualité chrétienne (MC)
- Madeleine Guyot, pour la Ligue des Familles.
- Amélie Servotte, pour Vie Féminine
Simon Vandamme