Réforme des soins de santé
Trois objectifs prioritaires en matière de soins de santé orientent désormais la politique de santé

La Commission des Objectifs de Soins de Santé (GDOS), instaurée par la loi du 6 novembre 2023, amorce un tournant stratégique pour le système de santé belge. Alors que le Conseil Général de l’INAMI a rendu ce lundi son avis sur une première série de trois objectifs, la Mutualité chrétienne (MC) réaffirme son soutien total à cette réforme structurante — une réforme qu’elle a elle-même contribué à initier – et salue cette nouvelle dynamique dont l’ambition est d’améliorer la performance du système des soins de santé au bénéfice des patients.
« Depuis le début, nous avons été parties intégrante de cette nouvelle approche. Parce que nous croyons fermement qu’un système plus performant, plus juste et plus humain est possible », déclare Élise Derroitte, vice-présidente de la MC.
Le grand changement, soutenu par la MC, réside dans l'orientation de la politique. Alors qu'auparavant, celle-ci était axée sur les différents « silos », elle se concentre désormais sur des objectifs concrets de santé publique. « La question n'est donc plus de savoir combien chaque groupe professionnel a besoin ou a reçu historiquement, mais combien chaque patient a besoin pour bénéficier de soins de qualité », explique Elise Derroitte. Les besoins réels des patients et les résultats des soins qu'ils reçoivent sont désormais au centre des préoccupations.
« Se fixer des objectifs clairs, adossés à des indicateurs pertinents, c’est une façon de remettre du sens dans les politiques de santé. Mais pour que cette réforme ait un impact, elle doit coller à la réalité du terrain et à l’expérience vécue par les patients », insiste Élise Derroitte.
1. Accessibilité des soins (OSS5) : une urgence sociale
« Trop de personnes renoncent à des soins essentiels parce qu’elles n’en ont tout simplement pas les moyens. Ce n’est pas un détail, c’est un scandale silencieux », déclare Élise Derroitte.
La MC soutient la création d’un nouveau statut de « patient protégé », inspiré du statut affection chronique, avec une protection proportionnelle au risque de difficulté financière, un accompagnement personnalisé et une réduction du reste à charge. Il faut aussi augmenter l’offre de soins conventionnés et limiter les dépenses disproportionnées qui mettent en péril la stabilité financière du patient.
Plus encore, renforcer l’accessibilité des soins c’est aussi en augmenter la disponibilité sur le territoire, s’assurer que les soins sont prodigués de manière adéquate pour les patients, et en développer la sensibilité à des pathologies parfois négligées, comme l’endométriose par exemple.
2. Première ligne et coordination des soins (OSS3) : remettre le patient au centre
Une meilleure organisation de la première ligne, couplée à une coordination effective avec la deuxième ligne, est essentielle pour les patients atteints de pathologies chroniques ou de multimorbidité.
« Un bon système de santé, c’est un système qui accompagne, qui suit, qui relie. Pas un labyrinthe où le patient est seul face à sa maladie et aux démarches », souligne Élise Derroitte.
La MC appelle au développement de plans de soins individuels, à une approche orientée sur les objectifs de vie de chacun, et à l’intégration de déterminants sociaux, écologiques et numériques dans l’analyse des besoins.
3. Miser plus sur la sensibilisation, prévention et le dépistage (OSS7)
La Belgique affiche des performances insuffisantes en matière de prévention et de promotion de la santé, notamment sur le tabagisme, l’alimentation et l’activité physique, avec des inégalités marquées d’accès aux soins selon les milieux sociaux. Il est crucial de renforcer les programmes existants, notamment pour le dépistage du cancer colorectal, du col de l’utérus et des cancers liés au tabac, tout en assurant leur accessibilité et leur efficacité.
Pour Elise Derroitte : “La meilleure maladie, c’est celle qu’on ne développe pas : c’est pourquoi la prévention doit devenir une priorité politique et budgétaire. La fragmentation institutionnelle nuit à la coordination des politiques, appelant à une gouvernance plus cohérente et intégrée entre tous les niveaux de pouvoir.”
Priorités : renforcer la prévention primaire, améliorer l’accès aux soins, promouvoir un mode de vie sain, investir dans la recherche sur les déterminants de santé, et former continuellement les professionnels, dans un contexte de pénurie préoccupante de personnel qualifié.
Gouvernance et méthode : des garanties nécessaires
La MC soutient pleinement cette nouvelle dynamique car elle offre une occasion unique d’améliorer structurellement la performance de notre système de santé. Pour réussir, cette démarche doit s’appuyer sur une gouvernance claire et inclusive. En clarifiant le cadre budgétaire et en articulant efficacement les travaux de la Commission des objectifs de soins de santé avec le processus budgétaire classique, on évitera les blocages et on assurera la cohérence et l’ambition des décisions.
Surtout, la participation active des organismes assureurs et des professionnels de santé est essentielle : leur ancrage dans la réalité du terrain, leur connaissance fine des besoins des patients et leur rôle clé dans le fonctionnement du système peuvent grandement enrichir les travaux. « Notre expérience est un levier : elle permet de faire des choix méthodologiques qui tiennent compte des vrais enjeux de santé, et de mieux cibler les priorités là où le système sous-performe », souligne Élise Derroitte.
En associant toutes les expertises pertinentes autour d’objectifs partagés, nous pouvons construire un système de santé plus juste, plus cohérent et réellement tourné vers les besoins de la population.
« Cette réforme est une chance, mais elle ne doit pas reproduire les défauts du passé sous un nouveau nom. Elle doit aller au bout de sa logique de performance, de transparence et de justice sociale », conclut Élise Derroitte.